Marguerite Hoppenot éclaire l’actualité de l’Église synodale par ses écrits « Le temps du feu », publié à l’occasion du Concile Vatican II en 1965.

Le synode sur la synodalité a rassemblé 364 membres, dont 45 laïcs et 54 femmes religieuses ou laïques en octobre 2023 à Rome. Des débats à huis clos sur la synodalité, la communion, la co-responsabilité dans la mission et la gouvernance de l’Église, qui inaugure une nouvelle manière de travailler ensemble, une formule voulue par le Pape François.

Le rapport synodal « prône une Église ouverte à tous et proche d’un monde blessé » (Vatican News, 28 octobre 2023 VN[1]). Toutes les blessures du monde semblent y avoir été abordées, dans un climat d’écoute où la parole a pu largement s’exprimer.

Ces extraits du « temps du feu » sont en écho aux différents thèmes abordés. Le mot « Concile » est remplacé par le mot « synode ».

Dans ce contexte, comment ne pas entendre à nouveau la poignante interrogation de Paul VI : « Que faire pour l’Église du Christ ? »
Marguerite Hoppenot : « Si l’Église des chrétiens, malgré tout ce qu’elle fait, ne porte pas davantage de fruits de vie, n’est- ce pas la claire indication que, c’est à son être même qu’il faut lui prêter attention, à sa santé profonde, à sa fidélité, à la vie, cette vie du Christ qu’elle a d’abord vocation « d’être », avant d’avoir pour mission de l’engendrer jusqu’à la fin des temps… »

En fait, que signifie ce synode ?
Marguerite Hoppenot : « Doit-il être considéré par les chrétiens comme l’aube de changements ou comme l’heure du renouveau dans la vie de l’Église ? Est-il le signe de nouvelles orientations ou celui d’une fidèle restauration de son éternel “Orient” ? Je crois qu’un synode est surtout un acte de foi renouvelée en Jésus-Christ. »

Si la synodalité vient impulser la collégialité, …
Marguerite Hoppenot : « … N’est-ce pas une invitation à restaurer la collégialité en tant que forme de gouvernement… mais plus profondément celle de la collégialité en tant que communauté, car c’est la communauté qui donne à la collégialité sa pleine signification. Ce rappel soulignerait l’exigence centrale qui pèse sur elle : être présence vivante et signe visible de la Vie de Dieu parmi les hommes. »

La synodalité, l’avenir de l’Église va donc de pair avec la mission, n’est-ce pas l’occasion de rendre visible pour faire croire ?
Marguerite Hoppenot : « Le prodigieux réveil de l’Église et le mouvement dynamique que l’Esprit vient de lui insuffler sont désormais livrés à la fidélité de l’Église toute entière : fidélité à rendre visible Celui en qui nous voulons faire croire, en le vivant… Au milieu de leurs frères, les chrétiens sont donc appelés à être non seulement individuellement, mais ensemble, « parole vivante ». L’apostolat chrétien lie indissolublement le « faire à l’être », le spirituel à l’humain, l’action à la contemplation. »

La figure et le rôle de l’évêque font l’objet d’une large réflexion. Il est appelé à être « un exemple de synodalité » …  En sus, l’évêque « ne trouve pas toujours de soutien humain et spirituel » et « il n’est pas rare qu’il fasse l’expérience douloureuse d’une certaine solitude. » (VN)
Marguerite Hoppenot : « Plus s’accroit le poids du pouvoir, plus devrait apparaître et s’imposer à l’esprit des responsables de ce pouvoir, comme étant l’exigence et le principe vital d’une hiérarchie selon Jésus-Christ, une image aussi paradoxale qu’inhabituelle : celle d’une pyramide renversée… l’exercice de tout pouvoir ne doit pas conduire à s’élever pour dominer et couronner l’édifice, mais à s’enfoncer pour le porter et supporter l’édifice »

 « Les laïcs, les personnes consacrées et les ministres ordonnés ont une égale dignité. » (VN)
Marguerite Hoppenot : « À l’exigence vitale d’un laïcat pleinement engagé doit nécessairement correspondre l’exigence vitale d’un laïcat pleinement responsable. La mission du laïc n’est pas celle du prêtre, toutefois il a soif de reconnaitre vivantes, dans l’attitude des représentants de Jésus-Christ à son endroit, ces paroles que le fils de Dieu, avec tant d’Amour, disait à ses disciples : « Désormais, vous ne serez plus seulement mes serviteurs, mais mes amis. »  Les laïcs ont besoin de confiance : pour donner leur pleine mesure, il leur est nécessaire d’être non seulement « utilisé », … mais d’être utiles, appelés à une fraternelle collaboration, en vue de l’urgent labeur de Royaume, qui ne requiert pas seulement d’eux un service passager, mais une communion. »

« Un fort engagement est demandé à l’Église pour l’accompagnement et la compréhension des femmes dans tous les aspects de leur vie, y compris pastorale et sacramentelle. » (VN)

Rôle de la femme
Marguerite Hoppenot : « Le corps ecclésiastique ne semble pas se poser la question précise de la vocation féminine en regard de la vie de l’Église. Il ne semble pas s’interroger suffisamment sur l’éventuelle nécessité pour elle d’un apport plus réel de la femme… Grâce susceptible d’assurer plus inébranlablement en elle ce primat de l’Amour essentiel à sa pleine fidélité d’épouse du Christ, indispensable aussi à son éminente fonction de maternité. »

La vocation féminine, une interrogation pour l’Église
Marguerite Hoppenot : « La remise en valeur de l’Église comme peuple de Dieu, commande une nouvelle prise de conscience relative à l’homme créé homme et femme.
L’heure me semble venue pour l’Église de jeter un regard neuf sur le rôle de la femme en son sein… Aucune évolution, cependant, ne doit faire perdre à la femme la spécificité de sa vocation. Respecter l’influence spécifique de la femme est d’une extrême importance, car celle-ci consiste à maintenir le monde des hommes dans son équilibre fondamental, en le reliant aux deux sources de son existence : les réalités naturelles et les réalités surnaturelles. Sa fonction propre la dispose donc à une double attitude, l’une qui la fait se pencher sur les humbles réalités de la terre….
L’autre qui force la tête des hommes à se tourner vers le haut, à dépasser le cadre des constructions étroitement humaines. L’épouse du Christ a tendance, en effet, à manquer d’un certain réalisme, et donc à être insuffisamment harmonisée avec les êtres, avec la vie….
Pour que l’Épouse de Jésus-Christ se conforme toujours davantage à l’image de son Maitre- et cette image implique la dualité homme-femme- il faut que ses attitudes purement masculines empruntent au génie féminin ce qu’il y a d’essentiel pour rejoindre et l’Esprit et la vivante réalité du monde. Les œuvres masculines auront toujours besoin d’une maternité pour revêtir pleinement leur reflet divin… il faut pour cela des femmes qui complètent l’immense richesse de l’apport masculin par de multiples nuances de l’intelligence du cœur : intuition, accueil, pauvreté d’elle-même, sens du dialogue, attention à la vie et à l’Esprit…
Peut-être l’Épouse du Christ verrait-elle alors revenir une multitude de ses enfants… à l’image de ces foules, irrésistiblement attirées par Jésus. Cette chaleur d’un vivant Amour qui aimante et recrée les hommes, non seulement par ce qu’il fait, mais d’abord par ce qu’il est. »

Impatience et patience de Dieu
Marguerite Hoppenot : « En Dieu se résument toutes les patiences et toutes les impatiences de l’Amour !… Après s’être fidèlement rassemblé, avoir prié, travaillé, parlé, débattu, interprété, essayé de convaincre, …. Le temps me semble venu, pour le peuple de Dieu, de faire silence, d’accepter cet hiver des hommes et de se recueillir sur les semailles que l’Esprit, à travers la communauté de ses Évêques, prodigua à notre terre souvent aride. »

À l’approche de Noel : « Tu es le messie ! »
Marguerite Hoppenot : « Lorsque à l’approche d’un nouveau Noël des hommes, l’immense labeur synodal aura touché son terme…
De ce surnaturel engendrement du synode, quelle étoile émergera dans la grisaille du ciel pour guider clairement la marche des enfants de Dieu et les entrainer plus surement sur le chemin du Dieu vivant ? Ce mystère de Vie est imprimé en creux par le Créateur au cœur de tous ses enfants… : « Tu es le Messie ! » »

Emmanuel, membre du Mouvement Sève – novembre 2023

[1] https://www.vaticannews.va/fr/vatican/news/2023-10/synode-synodalite-document-final-synthese.html